Le PLFSS adopté en première lecture par les députés
Qu’est-ce que le PLFSS (Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale) ?
- Le PLFSS, présenté annuellement par le Gouvernement à l’automne, a pour objectif de maîtriser les dépenses sociales et de santé. A travers cette action, il détermine les conditions nécessaires à l’équilibre financier de la Sécurité Sociale.
- Le Parlement vote pour ce projet tous les ans. Il doit être déposé à l’Assemblée Nationale au plus tard le 15 octobre. Le Parlement dispose de 50 jours pour se prononcer. Si ce délai se voit être dépassé, le PLFSS peut être adopté par voie d’ordonnance.
Les principales mesures du PLFSS 2022
L’article 24 : La télésurveillance
«Dans le cadre du Ségur de la santé, la télésanté est apparue comme un enjeu clé de la transformation du système de santé. Ainsi, la mesure 24 y est entièrement consacrée et prévoit notamment comme objectif de fixer le périmètre et les principes du financement de la télésurveillance par l’assurance maladie obligatoire […] Les prises en charge existantes sont ainsi pour l’essentiel expérimentales et ne s’inscrive pas dans un cadre unifié de prise en charge par l’assurance maladie. Donc, l’objectif de la mesure est de définir l’architecture globale et les différents paramètres d’un modèle de financement de droit commun de la télésurveillance par l’assurance maladie (périmètre des activités, modalités d’évaluation, formes de financement), ainsi que les modalités de transition du modèle expérimental vers une prise en charge de droit commun.»
Source : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4523_projet-loi#D_Article_24
L’article 24 concernant la télésurveillance a été modifié par un amendement visant à s’assurer que les activités de télésurveillance seront bien réalisées par des professionnels de santé exerçant auprès d’offreur de soins traditionnels.
L’article 26 : La réforme des urgences
« La réforme du financement des urgences, introduite par l’article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, repose sur trois piliers de financement : une dotation populationnelle, une dotation complémentaire qualité et des recettes liées à l’activité.
S’agissant du financement à l’activité des passages non programmés non suivis d’hospitalisation, l’architecture issue des mesures adoptées en LFSS pour 2020 et complétées en LFSS pour 2021 vise à simplifier, à unifier et à mieux hiérarchiser la facturation des prestations aux urgences, à l’assurance maladie comme au patient ou à son assurance maladie complémentaire […] La mesure vise d’autre part à reporter l’entrée en vigueur du forfait patient urgence du fait de la prolongation au second semestre 2021 de la garantie de financement dont bénéficient les établissements de santé dans le cadre de la pandémie de covid‑19. L’entrée en vigueur initialement prévue au 1er septembre 2021 est reportée au 1er janvier 2022.»
Source : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4523_projet-loi#D_Article_26
On a modifié l’article 26 comme suit :
- les expérimentations en cours sur les règles d’organisation et de financement des transports sanitaires urgents pré-hospitaliers sont prolongées
- l’impact du reste à charge des usagers sera pris en compte dans l’évaluation du dispositif
- les ajustements relatifs aux différents cas d’exonération du forfait patient aux urgences seront appliqués dès que le forfait patient urgences entrera en vigueur afin d’éviter une mise en place en deux temps.
L’article 37 : La substitution des médicaments biosimilaires
Les biothérapies en dermatologie
Les biomédicaments se caractérisent par des approches cellulaires et/ou des approches technologiques issues du génie génétique, notamment :
- La technologie de l’ADN recombinant consistant à introduire un gène étranger et à le faire exprimer dans un micro-organisme, dans des cellules animales, végétales ou dans un organisme supérieur
- L’expression contrôlée de gènes qui codent des protéines biologiquement actives dans des procaryotes ou eucaryotes
- Les méthodes à base d’hybridomes pour la production d’anticorps monoclonaux
Les biomédicaments ont révolutionné la prise en charge thérapeutique des patients dans les années 2000. Ce qui a donné lieu à une forte pénétration du marché par ces produits. On utilise beaucoup les biothérapies dans le cadre des traitements dermatologiques. Elles permettent de traiter le psoriasis, le mélanome, la maladie de Verneuil, les maladies bulleuses ou l’urticaire chronique. Néanmoins, le principal frein à la prescription de biothérapies en ville était la contrainte de prescription initiale hospitalière. Ce qui peut représenter une perte de chance pour les patients qui ont subi des difficultés d’accès aux services compétents.
Ce qui est prévu dans le PLFSS
Le PLFSS 2022 propose à l’article 39 d’élargir le rôle des pharmaciens pour la substitution de certains groupes de médicaments biosimilaires. Les pharmaciens sont maintenant autorisés à délivrer, par substitution au médicament biologique prescrit, un médicament biologique similaire. Ce qui revient, en réalité, à initier un nouveau traitement.
On a modifié l’article 37 comme suit :
- l’apposition de la mention « Non substituable » sur les ordonnances doit dorénavant être justifiée par des raisons tenant à la situation médicale du patient
- dans le cas de substitution d’un médicament biosimilaire par un autre, le pharmacien doit informer le prescripteur mais aussi le patient de la substitution
- le gouvernement devra remettre au Parlement, dans les six mois suivant l’entrée en vigueur de la loi, un rapport établissant la liste des dispositifs médicaux pouvant faire l’objet d’une substitution
L’article 40 : Les orthoptistes
Ce qui est prévu dans le PLFSS
L’article 40 du PLFSS 2022 propose d’autoriser les orthoptistes à réaliser des bilans visuels et à prescrire des verres correcteurs et des lentilles de contact oculaire sans prescription médicale. De plus, l’article prévoit d’autoriser les orthoptistes à réaliser sans prescription médicale le dépistage de l’amblyopie chez les enfants âgés de 9 à 15 mois et celui des troubles de la réfraction chez les enfants âgés de 30 mois à 5 ans.
L’article 40 autorisant les orthoptistes à réaliser des bilans visuels et à prescrire des verres correcteurs et des lentilles de contact oculaire sans prescription médicale a été modifié comme suit :
- l’orthoptiste ne peut délivrer une première prescription de verres uniquement si le patient a consulté, dans un délais précisé par décret, un médecin ophtalmologiste.
Par ailleurs, les députés ont adopté des amendements qui autorisent la délégation d’actes et l’accès direct pour les orthophonistes, les kinésithérapeutes et les infirmières en pratique avancée. Vous trouverez en pièce jointe de ce mail les dépêches APM sur ces sujets :
- L’expérimentation pour 3 ans de l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes dans certains départements prévue par l’article 41.
- L’expérimentation pour 3 ans de l’accès direct aux orthophonistes exerçant en exercice coordonné dans certains départements par l’article 41 sexies.
- L’autorisation pour les infirmiers en pratique avancée de réaliser, dans trois régions, certaines prescriptions soumises à la prescription médicale dont la liste est fixée par décret (article 41 octies).
- La validation par l’Assemblée nationale de l’élargissement des compétences des orthoptistes. Cela leur permet d’effectuer des bilans visuels et de prescrire des lentilles ou des verres correcteur sans tutelle médicale.
- La colère des syndicats des médecins libéraux face à l’adoption de plusieurs mesures du PLFSS favorables à la délégation d’actes.
Zoom sur le communiqué de presse intitulé “PLFSS 2022 : Non à l’ubérisation de la médecine”
Le communiqué des Conseils Nationaux Professionnels de Médecine Physique et Réadaptation, d’Ophtalmologie et d’ORL date du 3 novembre 2021. C’est une opposition ferme “à la création d’un accès direct aux professions paramédicales sans diagnostic médical préalable au travers du PLFSS 2022.”
- Il s’agit ici de la remise en question même du rôle premier du médecin en tant que diagnosticien et thérapeute. Donner la possibilité de déléguer ce rôle à des professionnels n’ayant pas les acquis (tant dans la formation que dans la pratique) revient à prendre des risques incalculables. C’est cela que dénonce les Conseils Nationaux Professionnels, qui craignent des diagnostics erronés ou tardifs pouvant entamer les chances de guérison d’un bon nombre de patients.
- La consultation médicale d’orientation se trouve être primordiale pour révéler et prévenir des affections silencieuses.
- La crainte est aussi là pour la compréhension de ces lois chez les patients. Dans cette confusion totale, ils ne sauraient plus distinguer les différents rôles des corps médicaux et paramédicaux.
→ Les Conseils Nationaux Professionnels lancent donc un cri d’alarme aux sénateurs et députés pour refuser ces nouvelles mesures. Celles-ci transforment un parcours de soin, clair et aux frontières délimitées, entre médecins et paramédicaux en une concurrence directe.
La position du SNDV
Le SNDV s’insurge contre le tronçonnage de la médecine qui n’améliorera pas le parcours de soins des patients. En effet, risque de provoquer des errances diagnostiques et thérapeutiques.
Le SNDV a souhaité exprimer son opinion sur 3 mesures du PLFSS 2022.
Les équipes de soins spécialisés (ESS)
Le SNDV soutient la mise en place des équipes de soins spécialisés qui répondent à un besoin en dermatologie. Et la raison est la baisse du nombre de dermatologues sur le territoire. Il souhaite attirer l’attention sur l’importance d’obtenir des financements sur le long terme afin de pouvoir pérenniser ces dispositifs.
La substitution des médicaments biosimilaires
Depuis longtemps, le SNDV milite pour permettre aux dermatologues libéraux de réaliser la première prescription des biothérapies. Le SNDV s’oppose à la substitution des médicaments biosimilaire par le pharmacien. Car cela revient, en raison de la spécificité de ces médicaments, à initier un nouveau traitement. Or, aujourd’hui, on ne permet la primo-prescription de biothérapie en dermatologie qu’aux praticiens hospitaliers. Le syndicat souhaite ainsi renouveler sa demande d’élargissement de cette compétence à l’ensemble des dermatologues (hospitaliers et libéraux).
L’autorisation de professionnels paramédicaux à prescrire des actes médicaux
- Le SNDV s’inquiète de cette mesure et d’une possible extension à moyen termes à d’autres spécialités. On note par exemple la dermatologie qui dispose d’assistants médicaux. En effet, si les assistants médicaux en dermatologie répondent à un enjeu d’amélioration de l’accès aux soins, d’assurance de meilleur exercice et d’efficience de la prise en charge et du suivi des patients, ceux-ci ne disposent pas des formations nécessaires pour interpréter les résultats des actes et donc de prescrire les soins appropriés.
- Le SNDV est favorable à l’idée que les paramédicaux travaillent au sein des cabinets. Et ce, pour améliorer la prise en charge des patients sans baisse de la qualité des soins.
Sources :